Blog de l’auteur

JC Oz

juillet 2017 | Il est mort Jim

Je ne fréquente pas le rituel catholique. Les églises ont sur moi un irrépressible pouvoir d’attraction mais je les aime vides. Au Mexique, où la vie m’a guidé pour quelques années, les messes s’y enchaînent, les fidèles s’y pressent et j’essaie de m’y frayer un chemin comme un quai de métro qu’on voudrait moins bondé.
Je me signe rarement devant les bénitiers mais j’ai pour Jésus un attachement particulier.
Cet homme, fait de chair et de sang, qui a souffert son chemin dans l’obscurité de son siècle, me touche et m’impressionne. C’est une des raisons pour lesquelles je parle de lui à plusieurs reprises dans Il est mort Jim.

Amos Oz, dans son roman Judas (Editions Siruela), écrit une description poignante de son martyre sur la croix.

Durante seis horas no dejó el crucificado de gritar y de gemir. Cuanto más se prolongaba su agonía, más lloraba, gritaba y chillaba de dolor y llamaba sin cesar a su madre, la llamaba y volvía a llamarla con una voz fina y penetrante, una voz parecida al llanto de un niño herido de gravedad al que han abandonado en el campo para que muera de sed y se desangre bajo el sol arrasador. Era un grito desesperado, un grito que ascendía y volvía a ascender y helaba la sangre, madre, madre, y luego llegó un alarido de dolor lacerante y de nuevo madre […].
Y había allí, justo a los pies del crucificado central, cuatro o cinco mujeres desesperadas, mujeres desconsoladas que estaban apretadas las unas contra las otras, un hombro apoyado contra otro hombro, casi abrazadas, pero no estaban abrazadas, porque tenían los brazos caídos junto a sus cuerpos. De cuando en cuando, una de ellas rodeaba los hombros de la mujer mayor con el brazo, le acariciaba las mejillas y secaba su frente con un pañuelo. La mujer mayor estaba allí como petrificada, como si le hubiera dado una parálisis, no quitaba ojo de la cruz, pero sus ojos estaban secos. […] No apartaba ni un instante sus ojos abiertos de par en par del hombre crucificado. Era como si lo que le quedaba de vida dependiese por completo de la perseverancia de su mirada. […] Durante todas aquellas horas abrasadoras, mientras su sangre brotaba de sus heridas hasta la última gota, el crucificado central llamó a gritos a su madre. Tal vez también la viera a ella mientras sus ojos se iban apagando, encorvada a sus pies en medio del grupo de mujeres desconsoladas y buscando sus ojos en los suyos. […]. Ni una sola vez durante aquellas cinco horas llamó el crucificado a su padre. Una y otra vez gritó, madre, madre. Durante horas estuvo llamándola a gritos. Y sólo en la hora sexta, en el último instante, justo cuando expiraba, lo reconsideró y gritó de pronto a su padre. Pero tampoco con su último grito llamó a su padre, padre, sino que murmuró, Dios mío, Dios mío, por qué me has abandonado.

Six heures durant, le crucifié ne cessa de crier et de gémir. Plus se prolongeait son agonie, plus il pleurait, criait et hurlait de douleur et plus il appelait sa mère, il l’appelait et l’appelait encore d’une voix fine et pénétrante, une voix semblable à celle d’un enfant gravement blessé qu’on a laissé sur place afin qu’il meure de faim et se vide de son sang sous un soleil écrasant. C’était un cri désespéré, un cri qui montait et montait encore et qui glaçait le sang, mère, mère, puis un lacérant hurlement de douleur et de nouveau mère […].
Et il y avait là, juste aux pieds du crucifié central, quatre ou cinq femmes désespérées, des femmes inconsolables serrées les unes contre les autres, l’épaule appuyée sur une autre épaule, presque enlacées, mais elles ne s’embrassaient pas. Leurs bras étaient ballants. De temps en temps, l’une d’entre elles entourait les épaules de la femme plus âgée, lui caressait les joues et avec un mouchoir séchait son front.
La femme plus âgée était comme pétrifiée, comme paralysée. Elle fixait la croix mais ses yeux étaient secs […]. Elle ne quittait pas de ses yeux grands ouverts l’homme crucifié. C’était comme si ce qui lui restait de vie dépendait complètement de la persévérance de son regard […]. Tout au long de ces heures brûlantes, le crucifié central appela sa mère à cor et à cri. Peut-être la voyait-il aussi pendant que ses yeux s’éteignaient, voutée à ses pieds au milieu du groupe de femmes inconsolables et qui cherchait ses yeux dans les siens […]. Pas une seule fois durant ces cinq heures, le crucifié n’appela son père. Encore et encore il cria mère, mère. Pendant des heures il l’appela de tout son cœur. Ce n’est qu’à la sixième heure, au dernier instant, au moment où il expirait, qu’il se ravisa et appela son père. Mais même dans son dernier cri, il n’appela pas son père, père mais murmura Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ?